dimanche 13 février 2011

Flamme de marin



La leçon que j'ai la mieux retenue de mes cours de philosophie est que tout ce que je pense ou que j'écris a déjà été bien mieux pensé et bien mieux écrit avant moi...
Sorj Chalandon l'a si bien prouvé dans le Canard enchaîné que je ne résiste pas au plaisir de vous livrer ses mots.
Ce qui par ailleurs n'empêche nullement d'avoir un avis sur la question : précipitez-vous dans les salles !

"Sortie de prison, et son fils placé chez les grands-parents, Angèle passe des petites annonces pour trouver un homme. Marin pêcheur, Tony lui répond.
C'est l'histoire de deux taiseux, et de deux horizons. La terre pour elle, la mer pour lui. Elle porte la violence des villes. Il combat la force du vent. Il cherche une femme. Elle espère un toit. Elle est trop belle pour lui. Il est trop seul pour elle. Ces deux là n'ont aucune chance de se rencontrer, de s'apprivoiser, de s'aimer, strictement aucune.
C'est sur ce frêle esquif qu'Angèle et Tony nous embarquent. La belle et le rude, le choc des mondes, l'apprentissage de l'un par l'autre. Mais le propos est débarrassé de tout artifice. Ni démonstration laborieuse ni émotion factice. Clotilde Hesme est une blessure. Grégory Gadebois, une clarté. Alix Delaporte ne le hurle pas, elle le murmure. La réalisatrice effleure chaque scène comme un secret. Et lorsqu'une route trop convenue s'offre à elle, elle choisit avec grâce le chemin de traverse.
L'enfant d'Angèle ne geint pas, ses secrets de prison ne quitteront pas leur cellule. il n'y aura ni coup de théâtre ni coup de cymbales. Pas un mot en plus, pas de regard en trop. De cette économie constante naît alors l'émotion. La vraie. Celle qui étreint la salle sans poisser l'écran. Autrefois journaliste de télévision, la réalisatrice filmait des personnages. Aujourd'hui, elle les protège."

Par les temps qui courent, on ne peut, quant à nous, faire l'économie de tant de beauté...

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